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lundi 26 avril 2010

Brève évaluation de la situation sociopolitique d'Haïti depuis le sommet du 31 mars 2010 à New-York, par la Cellule de Réflexion et d’Action Nationale

(Réunion du 25 avril 2010)

La Cellule de Réflexion et d’Action Nationale s’est réunie ce dimanche 25 avril 2010 sur la cour du noviciat de Tabarre. Plus de 120 personnes étaient présentes. Réparties en 10 ateliers d’une dizaine de personnes chacun, ils ont réalisé une brève évaluation de la situation sociopolitique du pays depuis le sommet de New-York sur la reconstruction d’Haïti, le 31 mars dernier.

Depuis le 31 mars dernier, aucun progrès n’a été observé dans le domaine économique en Haïti. Au contraire la situation économique a régressé. Le pays est pratiquement bloqué. Pas de création d’emploi. Le peuple haïtien et plus particulièrement la population sinistrée, vit encore dans des conditions infrahumaines, pires qu’avant le 12 janvier 2010. On ne perçoit à l’horizon aucune amélioration significative des conditions de vie. La distribution de l’aide d’urgence se fait dans le désordre et ne tient guère compte de l’ensemble des sinistrés. Seuls les gens qui vivent dans les camps ont accès, parfois difficilement, à cette aide. Le reste est pratiquement ignoré. La reprise de l’activité scolaire se fait partiellement. Seulement quelques écoles privées ont repris les cours, dans des abris provisoires. Les écoles publiques n’ont jusqu’à présent reçu aucune subside de la part de l’État. L’aide financière promise par le Gouvernement pour la réouverture des écoles n’arrive pas toujours.

La création de la Commission Intérimaire Mixte Gouvernement-Communauté internationale pour la reconstruction, avec comme grand patron, Bill Clinton, n’est que la légitimation d’une vieille commission qui existait déjà. Une loi d’urgence vient d’être votée par un Parlement contrôlé presque exclusivement par le Président René Préval. Cette loi consacre la mainmise presque totale de l’Exécutif, notamment de la présidence, sur l’appareil de l’État. Sans contrôle parlementaire, avec une société civile faible et peu organisée et une administration publique délabrée et dysfonctionnelle, on risque de déboucher sur l’arbitraire et des dérives graves dans la gestion de la reconstruction. Tout semble indiquer que les élections générales prévues pour la fin de l’année 2010 seront truquées. Le Conseil Électoral Provisoire (CEP), chargé d’organiser ces élections, est constituée en majorité des hommes du Président et donc n’inspire pas confiance.

La Communauté internationale a renforcé son emprise sur le pays. On assiste à une perte totale de la souveraineté nationale. Les ong’s, les agences des Nations-Unies et les ambassades des pays occidentaux remplacent dans la réalité les instances gouvernementales haïtiennes, tant au niveau des prises de décision que dans la mise en œuvre de ces dernières. Le décaissement des fonds promis par les bailleurs internationaux se fait encore attendre. Traditionnellement nous savons que les belles promesses des bailleurs de fonds dans les forums internationaux ne concordent pas toujours avec les fonds débloqués réellement. Les procédures de décaissement sont longues et compliquées. Et une bonne partie des fonds décaissés va aux agences des pays donateurs, atterrit dans les poches des experts, des grandes compagnies internationales et des fonctionnaires corrompus; elle sert aussi à financer des programmes de ces mêmes agences qui non seulement ne sont pas inscrits dans un plan national de développement, mais, dans la majorité des cas, constituent un réel blocage au développement des communautés locales. Nous savons que des 2.5 milliards promis par les États-Unis d’Amérique pour la reconstruction d’Haïti, moins d’un tiers ira au Gouvernement haïtien. Les deux tiers sont destinés au Département d’État, à l’Armée Américaine et serviront à financer les programmes de la USAID.

Si les milliards de dollars US promis à Haïti sont décaissés dans ces conditions, la refondation de la nation dont nous parlons dans certains secteurs de la société civile haïtienne ne restera qu’un vœu pieux et Haïti continuera donc de trainer ses maux séculaires. Par contre, ces agissements des gouvernements occidentaux contrediront la grande compassion et la solidarité sincère que leurs citoyens, dont ils sont les représentants, ont manifestées à l’endroit de ce peuple martyr, à la suite du tremblement de terre du 12 janvier.